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Jacob Aue Sobol TOKYO



Comme nous l'indiquions ici, Jacob Aue Sobol, récent nominé de l'agence Magnum, est le lauréat 2008 du prix Leica des éditeurs européens. Ce prix récompense un projet de livre qui est publié simultanément dans sept pays. Le Tokyo de Jacob Aue Sobol vient de paraître. Les photos noir et blanc très contrastées au gros grain sont belles et la maquette élégante avec des images pleine page. Pourtant, on a la sensation d'avoir déjà vu cela cent fois. Le style évoque à la fois Anders Petersen, Bruce Gilden, Antoine d'Agata ou Daido Moriyama : travail du noir et blanc, cadrages tranchants, crudité du regard. À Moriyama, Sobol emprunte également son sujet de prédilection, la ville de Tokyo et plus particulièrement le quartier de Shinjuku. Comme le maître japonais, il s'arrête sur des venelles encombrées de tuyaux et de câbles électriques, cadre des animaux errants ou crevés et multiplie les scènes sexuelles.


Nul doute quant à la sincérité de la démarche de Jacob Aue Sobol. Il explique dans sa postface comment, débarqué à Tokyo en 2006, il s'y est senti étranger et même invisible. Pour rompre sa solitude, il a entrepris de s'approprier la ville à l'aide de son appareil photo et d'en faire un moyen d'entrer en contact avec les habitants. Pourtant, par ses tics stylistiques ce très bel ouvrage pose de nombreuses questions. Un style est-il une panoplie qu'on décroche au magasin des accessoires ou est-il intrinsèque à un auteur ? Question subsidiaire, un auteur a-t-il besoin d'avoir un style ? On connaît de très importants photographes, Paul Graham par exemple, qui adaptent leur démarche à leurs sujets. Autre interrogation, peut-on faire fi de l'histoire de l'art ? Dans le cas présent, les grandes images de Tokyo de Moriyama datent des années 1960-70. N'y a-t-il pas, aujourd'hui, d'autres manières de représenter une réalité comparable à celle qu'il captait alors ? D'autres questions se posent quant à l'édition de ce livre. Pourquoi, des éditeurs de haut vol choisissent-ils de distinguer un travail aussi inscrit dans une tradition photographique ? Le rôle des prix serait-il, comme nous les suggérions ici, de valider des tendances bien établies ? Outre, encore une fois, sa grande beauté formelle, le mérite de Tokyo est donc de relancer un débat passionnant : qu'est-ce que la photographie aujourd'hui ?


PS : Je découvre ce matin, 31 novembre, l'article de Louis Mesplé sur Rue 89 intitulé "Le sombre Sobol a-t-il plagié les photos du morose Petersen ? " Plus qu'à la parenté avec Moriyama que je développais, il s'attache, comparaison d'images à l'appui, à la ressemblance frappante entre certaines photos de Sobol et de Petersen. Mais il va plus loin en analysant le mode de production des photos par immersion.


Jacob Aue Sobol, Tokyo, Actes Sud, 108 pages


Allez voir ailleurs !


Le déroulé du Tokyo de Jacob Aue Sobol sur le site de Magnum .

Le site de Daido Moriyama et d’autres images de Daido chez Photo-eye.

Les archives de Paul Graham, voir notamment ses images du Japon intitulées “Empty Heaven “.

Quelques images d’Anders Petersen, ici .

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